Mieux capter et analyser nos indicateurs physiologiques est déterminant pour le développement de dispositifs médicaux plus performants et, plus largement, pour l’essor de l’e-santé. C’est pourquoi l’innovation dans le domaine des biocapteurs est essentielle. Depuis 2008, le CIC-IT « Biocapteurs et e-Santé : innovation et usages », installé à Lille, accompagne les médecins et les entreprises dans la réalisation de solutions innovantes sur ce secteur.
Membre du réseau des Centres d’investigation clinique – innovation technologique (CIC-IT) créé à la fin des années 2000, le CIC-IT de Lille a développé un savoir-faire spécifique dans l’enregistrement et le traitement des signaux biologiques, cardiaques ou les EEG. Le centre peut aussi participer à toutes les phases de mise au point de ces dispositifs. « Nous allons de l’idée jusqu’au marché », résume Jessica Schiro, coordinatrice de projets au sein du CIC-IT.

Le Centre intervient tout d’abord lors des phases de conception des dispositifs. Il mobilise alors les compétences d’ergonomes réunis au sein du Living lab, baptisé Evalab. Leurs connaissances sont particulièrement importantes pour rendre l’utilisation des solutions la plus intuitive possible. « Par exemple, nous avons constaté de nombreuses erreurs dans la manipulation de stylo auto-injecteur, dues à des défauts d’ergonomie. L’utilisateur peut le tenir à l’envers et s’injecter le produit dans le pouce, ce qui peut entraîner une nécrose », explique Jessica Schiro.

Le lieu abrite aussi un incubateur dans lequel les start-up peuvent profiter de l’expertise et des équipements pour échanger sur ce type de problématiques. Le CIC-IT peut aussi agir sur la phase de prototypage, grâce à son fablab équipé d’un atelier de microélectronique, d’une imprimante 3D ainsi que d’un laboratoire de tests techniques. « Nous pouvons produire des cartes d’acquisitions de données qui permettent de recevoir les signaux de plusieurs capteurs en même temps », poursuit Jessica Schiro.

Le CIC-IT intervient également sur les projets d’évaluation de dispositifs médicaux, en lien avec les professionnels de santé, pour les accompagner jusqu’aux phases précliniques et cliniques, en accord avec la réglementation en vigueur (MDR 2017/745/UE). Enfin, le CIC-IT de Lille est membre de la Cellule d’expertise des technologies de santé (CETS) fondée en 2017 pour apporter un éclairage technique, scientifique et réglementaire à des porteurs de projets dans le domaine de la santé.

« Nous avons créé cette cellule pour regrouper les expertises cliniques et réglementaires, et accompagner ainsi les projets des fabricants. Nous nous positionnons comme un trait d’union entre les industriels et les médecins. »

Co-fondateur de start-up Le CIC-IT a contribué à la création de nombreuses start-up. C’est le cas, par exemple, de Mdoloris, avec le projet de technologie Analgesia Nociception Index (ANI) consistant à monitorer le niveau de douleur ressentie par le patient à partir de son rythme cardiaque. L’objectif est, notamment, de réguler ensuite l’anesthésie administrée aux patients. L’algorithme développé dans le cadre de ce projet a suscité d’autres applications, pour les nouveau-nés ou les femmes enceintes, entre autres.

Le CIC-IT accompagne le projet d’un médecin pour les patients stomisés. Ce système permet de remplacer les poches du patient par une pompe, à la manière d’une prothèse intestinale. « C’est une solution qui permet de prendre le relais de l’intestin, et ainsi de rétablir la physiologie naturelle de l’intestin en conservant sa motricité intestinale et en préservant le microbiote. » Là encore, l’accompagnement du CIC-IT a favorisé la création de la start-up ReverTech Stoma.

Le laboratoire de la Barrière hémato-encéphalique (LBHE) s’est donné comme mission de s’approcher au plus près de notre cerveau. Celui-ci est relativement isolé du reste de l’organisme par la barrière hémato-encéphalique (BHE), localisée au niveau des microvaisseaux sanguins cérébraux. Grâce aux péricytes et aux astrocytes, associés aux cellules endothéliales, ces microvaisseaux filtrent la plupart des éléments présents dans le sang pour n’apporter que le nécessaire au cerveau. Seuls quelques transporteurs et récepteurs spécialisés laissent passer des molécules, comme le glucose. Ainsi, cette barrière protège le cerveau, mais rend aussi son accès difficile, notamment pour les médicaments. Or, de nombreuses pathologies cérébrales, comme les maladies neurodégénératives ou les cancers, pourraient être mieux traitées s’il était possible d’accéder plus facilement au cerveau par voie sanguine.

L’équipe de Fabien Gosselet, directeur du LBHE, est spécialisée dans la modélisation et la compréhension de cette barrière. Son laboratoire est ainsi parvenu à développer un modèle de BHE humaine à partir de cellules souches hématopoïétiques. « Nous avons créé un modèle humain en utilisant des cellules souches de cordon ombilical. Nous avons transformé ces cellules en cellules endothéliales, puis nous les avons cultivées en présence de péricytes cérébraux, pour d’obtenir des cellules BHE », explique Fabien Gosselet. Ce modèle, qui a donné lieu au dépôt d’un brevet en 2014 (codétenu par l’Université d’Artois et Biocant, au Portugal), a permis au LBHE de nouer des partenariats avec des laboratoires académiques et pharmaceutiques désireux de tester l’efficacité et la capacité de molécules à atteindre le cerveau.

« Aujourd’hui, nous menons de nombreux projets autour du traitement des AVC, des cancers cérébraux, de la maladie d’Alzheimer ou, encore, sur le lien entre alimentation et BHE », ajoute Fabien Gosselet. L’offre partenariale du LBHE devrait s’étoffer dans les années à venir, alors même qu’il travaille sur la mise en place de modèle humain de BHE à base de cellules souches reprogrammées (iPSCs). « Comme d’autres laboratoires à travers le monde, nous sommes parvenus à reproduire la BHE humaine à partir de ces cellules, et à l’utiliser dans nos travaux de recherche. Mais il est nécessaire de poursuivre l’optimisation de ce type de modèle avant de le proposer à des partenaires », rappelle le scientifique.

Aujourd’hui, l’équipe de Fabien Gosselet souhaite aller plus loin et mieux caractériser la BHE, en particulier les différents récepteurs et transporteurs impliqués dans le passage de substances du sang vers le cerveau. L’objectif : utiliser ces systèmes naturels afin de les détourner et de délivrer au cerveau des molécules thérapeutiques, à l’instar du cheval de Troie. « De nombreuses recherches sont menées depuis plusieurs années sur la transferrine [protéine chargée de transporter le fer dans l’organisme] et son récepteur. C’est un système qui délivre le fer au cerveau, mais qui tarde, chez l’humain, à démontrer son utilité pour le transport de molécules à visée thérapeutique. Nous cherchons un partenaire avec lequel nous pourrions identifier de nouveaux récepteurs, et les employer pour faire passer des médicaments », indique Fabien Gosselet. Le LBHE souhaiterait ainsi développer un partenariat, impliquant le plateau de spectrométrie de masse de l’Université d’Artois (SMART), et le recrutement d’un ou plusieurs doctorants via le dispositif Cifre pour étudier ce sujet d’avenir.

Le sport n’est pas qu’une question de performance. L’activité physique, en général, a un impact majeur sur tout un ensemble d’indicateurs et de comportements liés à notre santé, notre nutrition, notre qualité de vie ou, encore, notre organisation sociale. Mesurer ces interactions est au cœur d’Eurasport. La plateforme technologique, inaugurée en 2016 au sein du site hospitalo-universitaire lillois, rassemble les compétences scientifiques de l’Université Côte d’Opale, de l’Université d’Artois et de l’Université de Lille. L’unité de recherche pluridisciplinaire sport, santé, société (URePSSS – ULR 7369) à laquelle est rattachée la plateforme, utilise ainsi cet outil pour développer des recherches ayant comme objet l’activité physique et le sport, avec des éclairages scientifiques pluridisciplinaires. « Nos recherches vont de la biologie à la sociologie », explique Serge Berthoin, responsable de la plateforme et enseignant-chercheur à la Faculté des Sciences du sport et de l’éducation physique (UFR3S — FSSEP) de l’Université de Lille.

Concrètement, la plateforme de 2 500 m2 rassemble plusieurs espaces consacrés à la pratique d’activités physiques adaptées, dont un gymnase, une salle de réentraînement (tapis roulants, ergocycles, postes de renforcement musculaire…), et une salle « zen » dédiée aux activités douces. À ces lieux s’ajoutent un plateau de recherche en sciences du sport et physiologie de l’exercice et un laboratoire de biologie spécialisé dans l’analyse de la fonction neuromusculaire et des marqueurs sanguins. « La grande force de la plateforme est de pouvoir réaliser un ensemble d’analyses (mouvement, fonctions physiologiques, biologiques…) sur une même unité de lieu », précise Serge Berthoin. Les équipes disposent ainsi d’équipements de pointe favorisant l’observation des adaptations, limitations et dysfonctions respiratoires, métaboliques et neuromusculaires à l’exercice permettant de développer une démarche de recherche translationnelle.

Plusieurs acteurs socio-économiques ont déjà fait appel à ces équipements et compétences scientifiques. L’entreprise de compléments alimentaires Naturex a ainsi étudié avec la plateforme l’impact d’une molécule contenue dans le chocolat sur les performances sportives. La Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) des Hauts-de-France et l’association Santélys ont examiné les avantages et inconvénients d’une pratique d’activité physique en distanciel vs. en présentiel pour des personnes fragiles de plus de 50 ans. La plateforme a aussi noué un partenariat structurant avec la Métropole de Lille, pour épauler les acteurs de la « sport-tech » du territoire et proposer un accompagnement mutualisé aux clubs sportifs et sportifs soutenus par la collectivité.

Aujourd’hui, la plateforme souhaite mieux mettre en avant sa capacité à développer une technologie ou un service, de la preuve de concept à l’expérimentation scientifique, notamment auprès d’acteurs socio-économiques. « L’outil Plug in labs HDF peut ainsi nous apporter une visibilité et nous mettre en réseau avec des acteur socio-économiques dont l’activité physique est au cœur de leurs projets » assure Serge Berthoin.